La migration clandestine au Détroit de Gibraltar-quelle alternative à l'approche sécuritaire?

AutorRachid El Houdaïgui
Cargo del AutorProfesor-Investigador de la Faculté de Sciences Juridiques, Économiques et Sociales. Universidad Abdelmalek-Essaâdi de Tánger-Tetuán. Director de la Revista Paix et Sécurité Internationales
Páginas191-198

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La migration et a fortiori celle clandestine interpelle les pouvoirs publics, la société civile et les chercheurs des deux rives de la Méditerranée. C'est aussi un phénomène planétaire qui connaît un développement très fort, puisqu'il n'y a pas moins de 120 millions de migrants dans le monde aujourd'hui.

Pour débattre de cette question nous allons nous distinguer des approches scientifiques unidimensionnelles qui traitent de ce sujet. On en distingue trois : l'approche légaliste s'intéresse aux textes juridiques et particulièrement à leur adaptabilité à la réalité, l'approche humaniste se situe souvent en marge de " l'establishment " et se veut porte-parole des migrants et enfin l'approche sécuritaire axée sur les moyens optimaux pour freiner les mouvements migratoires.

Notre démarche prône une lecture synoptique de la migration illégale impliquant toutes les dimensions du problème : politiques, économique, sécuritaire, géopolitiques, sociales. Elle est fondée sur deux postulats de départ susceptibles de lever toute ambiguïté dans notre propos :

D'abord, nous souhaitons éviter de désigner les migrants comme un " problème ", alors qu'ils ne sont qu'un produit de la politique mondiale. Naturellement, la question est " problématique " pour toutes les parties en présence, et les pays sont confrontés à des problèmes bien réels lorsqu'ils opèrentPage 192 dans la zone grise du maintien de l'ordre et de l'assistance aux personnes en mer. Toutefois, assimiler les réfugiés et les immigrés clandestins aux terroristes, saboteurs, trafiquants de drogue et autres indésirables, ou les classer dans la catégorie " problème " ou " menace " reviendrait à ignorer les complexités du phénomène.

Ensuite, la migration illégale est loin d'être un phénomène transitoire qui serait éradiqué par des moyens strictement ponctuels. Ainsi lorsque l'Union Européenne adopte une politique répressive en fortifiant ses frontières Sud elle ne traite finalement que les symptômes. Il convient de signaler qu'aujourd'hui aucune solution alternative à l'approche sécuritaire n'a été mise en oeuvre; on assiste plutôt à des effets d'annonces sans aucune portée pratique.

Pour démêler ce problème nous proposons de répondre à trois questions révélatrices de la réalité du phénomène :

Quel constat pouvons-nous faire de la gestion de la migration illégale ?

Quelle est la situation générale de la migration illégale ?

Quelles sont les solutions adéquates pour endiguer la migration illégale ?

I Le constat. L'echec du tout securitaire

L'échec de l'approche sécuritaire est dû essentiellement à une appréciation réductrice du phénomène. Pendant longtemps, les européens par exemple considérait que l'immigration illégale relève strictement de l'ordre public et que par conséquent seules les départements de l'intérieur et de la défense devraient intervenir, moyennant répression ; renforcement du contrôle des frontières fortifiant ainsi ses frontières du sud. Or, l'actualité dramatique prouve encore une fois que l'approche sécuritaire ne traite finalement que les symptômes. Certes on enregistre une baisse de 40 à 50 % des flux migratoires vers l'Europe notamment depuis l'engagement du Maroc dans le contrôle des frontières du Nord et du Sud : des centaines de soldats tout au long des côtes atlantiques et méditerranéenne. Mais il ne s'agit ici que d'une politique d'endiguement qui montre de plus en plus de faiblesses en raison des flux de nouveaux candidats africains et surtout en raison des stratégies adoptées par les réseaux mafieux : passage en force sur terre à Ceuta et Mellila ou encore diversion sur mer en lançant plusieurs pateras à la fois pour flouer les radars et disperser les force de sécurités.

Le pourrissement de la situation est dû en partie à l'absence de collaboration entre les Etats concernés La problématique n'étant pas maroco-espagnole, elle nécessite une approche impliquant tout les Etats concernés par l'immigration illégale qu'ils soient Etat-emetteurs, Etat-transit, Etat-destination. Hormis la collaboration maroco-espagnole rien n'est fait dans ce sens entre les autres parties. On s'étonne ainsi de l'absence d'accords de réadmission entre l'UE et les EtatsPage 193 africains des citoyens africains dans leur pays...

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