Le contrat unique : une bonne idée?

AutorNathalie Mihman
CargoDiplômée du master Etudes bilingues des droits de l?Europe. Université Paris X
Páginas1-5

X. Lagarde et A. Jeammaud, Controverse : Que penser du « contrat de travail unique ? », Revue de Droit du Travail, janvier 2007, p. 8-13.

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Une campagne présidentielle est le temps des idées, parfois nouvelles. Les propositions faites en matière sociale, comme nous le comprenons aisément, sont nombreuses. Une d’entre elles retiendra particulièrement notre attention : le contrat unique. Il est l’un des thèmes proposés aux électeurs de 2007 par un candidat fortement « présidentiable ». L’idée serait la suivante : protéger « moins les emplois et davantage les personnes, grâce à la création d’un contrat de travail unique, à durée indéterminée, à droits progressifs, plus souple en matière de licenciement économique »2. Il est difficile de ne pas reconnaître derrière ces propos le rapport des économistes Cahuc et Kramarz. Un bémol s’impose cependant sur cette accointance : le candidat est resté flou quant aux contours de ce contrat. Prévoit-il un contrat unique, inspiré du CNE3Son porte parole s’est voulu rassurant, cependant le doute subsiste. Il n’empêche que l’idée d’un contrat unique a été développée dans plusieurs rapports rédigés par des économistes4et qu’elle fait écrire les juristes5. Ces derniers ressentent parfois le besoin de commenter les propositions mises en avant dans ces rapports afin d’apporter leur bonne connaissance du contentieux judiciaire et plus largement des contraintes juridiques, parfois ignorées des premiers. Il existerait un lien entre l’insécurité de l’emploi et la nature des contrats de travail : la lutte contre le chômage passe-t-elle par la mise en place d’un contrat unique

1. Pourquoi un contrat unique

Les critiques sur le droit positif actuel, avancées pour justifier la nécessité d’un contrat unique, ne sont pas nouvelles. Nous les rappelons cependant afin de les replacer dans le cadre de la législation française (en y incluant les réformes les plus récentes). Ainsi, M. Cahuc et Kramarz désapprouvent notamment :

- Les procédures très précises en matière de reclassement interne et externe concernant les entreprises en cas de licenciement collectif.

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Sans reprendre celles-ci dans le détail, nous précisons simplement que l’obligation de reclassement interne est un préalable obligé à tout licenciement pour motif économique (art. L 321-1 CT) et que même lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi a été établi, il appartient à l’employeur de rechercher s’il existe des possibilités de reclassement, prévues et non prévues dans le PSE, au sein du groupe auquel l’entreprise appartient, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel6. De plus, l’insuffisance de contenu du plan de sauvegarde de l’emploi entraîne la nullité de la procédure de licenciement7et des licenciements subséquents8.

- L’absence de recherche d’accord entre l’employeur et les salariés en matière de licenciement collectif.

Il convient de nuancer cette appréciation depuis la pérennisation des accords de méthode9par la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005, bien que ces derniers soient conclus en amont10.

- La longueur des délais liée à la procédure du licenciement.

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Il est vrai que le Comité d’entreprise n’hésite pas à faire suspendre la procédure de consultation11s’il estime ne pas avoir été assez informé dans le cadre d’un licenciement collectif. Ce fait est à l’origine du développement des dits « accords de méthode » précités.

- Le renforcement de l’utilisation des CDD depuis le début des années 1990.

Le contrat unique tendrait à supprimer les inégalités de traitement que subissent les salariés en CDD (accès plus difficile à la formation, aux couvertures de santé complémentaire, au logement ou aux crédits bancaires).

- Plus généralement, Messieurs Cahuc et Kramarz mettent en avant un contournement du droit en matière d’emploi à durée déterminée et en matière de licenciement économique, ainsi qu’une absence d’anticipation des restructurations.

C’est d’ailleurs dans cette optique d’anticipation qu’a été introduite par la loi du 18 janvier 2005 l’obligation triennale de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences12.

Vouloir réduire les inégalités sociales et la précarité sont des objectifs estimables mais le contrat unique est-il le bon outil pour y parvenir

2. Les détails de la proposition

Pour Messieurs Cahuc et Kramarz, pour que puisse être atteint l’objectif de sécurisation des parcours, l’élaboration du...

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