Révision constitutionnelle. Langue française et Union Européenne

AutorClaude Olivesi/Jean-Paul Pastorel
CargoMaître de Conférence de Science Politique. Vice Président de l'Université de Corse/Maître de Conférence de Droit Public. Directeur du Centre d'Analyse Juridique et Politique de l'Université de Corse
Páginas47-66

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  1. Le 9 avril 1992 le Conseil constitutionnel, saisi le 11 mars par le Président de la République sur la base de l'article 54 de la Constitution, rend une décision indiquant que le Traité sur l'Union européenne, signé à Maastricht le 7 février 1992, comporte certaines dispositions contraires à la Norme fondamentale.1 Cette décision rend donc nécessaire une révision préalable de la Constitution avant ratification du Traité.

  2. Le 28 avril, le conseil des ministres adopte le projet de loi constitutionnelle présenté par le Président de la République sur proposition du Premier ministre, tendant à modifier la Constitution (art. 89 Constit.) par insertion d'un titre xiv nouveau intitulé: «de l'Union européenne», cette opération ayant comme objectif de mettre ainsi en conformité Constitution et Traité.

  3. Le projet ne fait nullement référence à la langue française, c'est le Parlement qui, utilisant son pouvoir constitutant dérivé, modifie, notamment, l'article 2 de la Constitution par introduction d'un nouveau paragraphe mentionnant que «la langue de la République est le français».2

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  4. Cette disposition, «bien qu'elle ne s'insère que très indirectement dans le cadre du projet de loi constitutionnelle»3 innove dans la mesure où, comme l'ont souligné de nombreux parlementaires dont le député X. Deniau, «c'est la première fois que... dans l'une de (nos) constitutions... le français est inscrit comme étant langue de (notre) pays».4 Le français reçoit donc pour la première fois un statut officiel-constitutionnel au même rang que les «principes majeurs» de la République «indivisible, laïque, sociale et démocratique» (art. 2 Constit.).

  5. On peut rapprocher la volonté des parlementaires de constitution-naliser le statut du français des conséquences que l'application du titre ix du Traité sur l'Union européenne est susceptible d'entraîner. Le président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale n'a-t-il pas rappelé que «certains aspects culturels pouvant être gérés conjointement par l'ensemble des États dans le cadre des instances communautaires en vertu de l'article 128 du Traité instituant l'Union européenne, il paraissait donc utile d'insérer cette référence dans la Constitution».5 C'est un fait que le constituant met aussi dans la Norme fondamentale ses rêves, ses espoirs, et y exprime ses craintes, ses peurs, ses rejets.6 C'est la T mention à la France et au français dans la Constitution.

I Le titre ix du nouveau Traité
  1. 6. Celui-ci, intitulé «Culture», attribue pour la première fois aux institutions européennes une compétence dans ce domaine.

    Son article 128-1 prévoit que «La Communauté contribue à l'épanouissement des cultures des États membres dans le respect de leur diversité nationale et régionale, tout en mettant en évidence l'héritage culturel commun».7 La culture devient un domaine important d'intervention communautaire. L'objectif de la Communauté consiste à mettre en évidence «l'hé-

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    ritage culturel commun des États membres» en respectant à la fois le pluralisme au niveau communautaire et celui pouvant exister au niveau interne propre à chacun des États; en effet la Communauté s'attribue le soin d'encourager la coopération de l'ensemble des États pour «promouvoir la spécîfité culturelle européenne» tout en contribuant à «l'épanouissement des cultures des États membres dans le respect de leur spécificité nationale et régionale». Ainsi une référence expresse est faite aux cultures régionales composantes d'une identité européenne plurielle. Les secteurs dans lesquels la Communauté pourra intervenir sont définis par l'alinéa 2 de l'article 128. Ils touchent, notamment, la diffusion et la connaissance de la culture et de l'histoire des peuples européens, la création artistique et littéraire y compris dans le secteur de l'audiovisuel.

    1. Le Conseil a compétence pour adopter des actions d'encouragement, sur proposition de la Commission après consultation du Comité des régions (nouvelle institution communautaire créée au chapitre 4 composée de 189 titulaires et autant de suppléants -la France disposant de 24 membres- représentants des collectivités régionales et locales) et avis du Parlement européen. La nouvelle procédure de co-décision introduite à l'article 189 B du Traité s'applique dans ce domaine de compétences communautaires. Tout en préservant la suprématie du Conseil dans la procédure législative, celle-ci renforce le pouvoir d'amendement des parlementaires européens, donne à l'Assemblée un poids égal à celui du Conseil au cours de la procédure de conciliation et lui laisse en fin de parcours, la possibilité de rejeter un texte qu'elle n'approuve pas. Le rôle de l'Union dans ce domaine est celui d'un complément aux actions des États membres excluant toute harmonisation de leurs dispositions législatives et réglementaires (art. 128-5). Les décisions pourront être prises à la majorité qualifiée.

    2. Cette nouvelle compétence représente une innovation. Pour la première fois, un traité communautaire fait expressément référence à une intervention dans le secteur de la culture organisant ainsi un tranfert partiel de compétence. Certes, la convention européenne des droits de l'homme (art. 14) énonce que la jouissance des droits et libertés doit être assurée sans aucune distinction et notamment de langue, mais elle ne reconnaît pas formellement les langues minoritaires et s'attache surtout à envisager les entraves aux droits individuels que la question des langues pourrait susciter. De même la convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant n'a qu'un objet restreint. Quant à la Cour de justice des Communautés européennes, elle ne s'est emparée qu'une fois du

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    problème des langues8 pour mettre en relief les incidences du principe de libre circulation des travailleurs. Seules des recommandations du Conseil de l'Europe9 ou des déclarations des conférences des ministres de la culture portent sur les langues en tant que telles, mais on connaît les limites juridiques de ces prescriptions. Le Traité sur l'Union européenne constitue donc une nouvelle donne et explique la volonté des parlementaires français de manifester leur volonté d'introduire dans la Constitution une référence à la langue française alors même que cette nouvelle compétence exclut comme l'indique le traité «toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des Etats membres». Mais il est vrai que les parlementaires ont pu être sensibilisés à cette question par la position de la Commission européenne qui, tout en reconnaissant qu'il est légitime de vouloir sauvegarder le support culturel que constitue la langue française, estime que l'obligation d'emploi d'une langue nationale ne saurait, en principe, être conforme au droit communautaire et justifiée que par des raisons de stricte protection du consommateur.10

  2. 9. Les traités établissant les Communautés européennes ne font aucune référence aux «langues les moins répandues» (autres que les officielles) et jusqu'à ce que le Parlement européen adopte le 16 octobre 1981 la résolution et le rapport arfe (Charte communautaire des langues et cultures régionales), aucune des principales institutions de la Communauté ne traitait de celles-ci.11 C'est à l'initiative d'un groupe de parlementaires européens que fut créé en 1982 un Bureau européen pour les langues les moins répandues et ouverte au budget communautaire une ligne spécifique pour des interventions dans ce domaine. Le montant de celle-ci, en dix ans, a été multiplié par vingt, passant ainsi de 100.000 ECU en 1983 à 2 millions d'ECU en 199112. Cette augmentation ainsi que les

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    différentes actions menées par le Bureau européen pour les langues les moins répandues témoignent d'un intérêt croissant de la Communauté pour les cultures régionales13 parties intégrantes «du patrimoine spirituel, artistique et littéraire de la Communauté». Cette position est réaffirmée par le Parlement européen dans sa résolution du 28 novembre 1988: «II est indispensable, pour l'identité culturelle européenne, de laisser une place aux spécificités régionales existant à l'intérieur de chaque État membre, en valorisant les spécificités actuelles et en respectant ainsi les intérêts, les aspirations et le patrimoine historique, linguistique et culturel propre à chaque région et en facilitant la coopération linguistique et culturelle transfrontalière ou interrégionale lorsqu'il existe des patrimoines historiques, linguistiques et culturels communs qui transcendent les divisions administratives actuelles».14 Une nouvelle étape a été franchie avec la résolution votée le 11 décembre 1990 à la quasi-unanimité (182 voix pour, 1 contre et 3 abstentions) par les députés européens. Celle-ci concerne la reconnaissance du catalan, langue à statut officiel en Catalogne et aux Baléares mais non étatique, si non en tant que langue de travail au moins en tant que langue d'usage pour les rapports entre la Communauté et les pays catalans. De plus la langue catalane sera désormais incluse dans les programmes élaborés par la Commission pour l'apprentissage des langues européennes, pour faciliter les échanges et la coopération in-tra-européenne. Si le terme «officiel» est absent de la résolution, les considérants qui la précèdent contiennent l'affirmation de l'adoption par les Institutions communautaires et notamment le Parlement, du principe du «pluralisme intégral», en cohérence avec le respect dû à la dignité de toutes les langues «reflets et expressions des cultures des différents peuples». Même si la pratique de toutes les langues dans les institutions européennes est techniquement impossible, cela ne doit pas conduire au refus du principe d'égalité de toutes les langues. Ce principe est apprécié comme fondamental afin que les «peuples d'Europe ne considèrent pas les institutions européennes comme un corps extérieur et étranger mais comme un élément faisant partie de la vie quotidienne des citoyens». Il est tout à fait remarquable de souligner que ce résultat fut obtenu par une importante mobilisation des opinions publiques de Catalogne et des îles Baléares soutenue par les autorités politiques des deux communautés autonomes.15

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    1. La position prise par l'Assemblée européenne dépasse largement la question du catalan. Les rédacteurs de l'article 128 du nouveau traité n'ont-ils pas explicitement fait référence au respect «de(s) diversité(s) ré-gionale(s)». Intérêt croissant pour les langues et cultures régionales, nouvelles compétences dans le domaine culturel, la construction européenne n'apparait plus seulement comme la réalisation d'un grand marché unique sans frontière. La constitutionnalisation du statut de la langue française témoigne d'une inquiétude, représente une illustration de cette possible «renationalisation» des politiques communautaires de la part des Etats membres16 et de la volonté de ne point sombrer dans une homogénéisation culturelle, véritable «volapûk» pour reprendre l'expression du Général de Gaulle.

II Motivations parlementaires pour une constitutionnausation
  1. Le projet de loi constitionnelle examiné par la commission des lois de l'Assemblée nationale ne comportait aucune référence à la langue française. Un amendement présenté par MM Toubon, Hyest et Lamas-soure tendant à ajouter à l'article 2 de la Constitution un alinéa 2 précisant que «Je français est la langue de la République» fut, dans un premier temps, déclaré irrecevable par la commission des Lois qui ne voyait pas en quoi «le Traité sur l'Union européenne mettait en cause la langue française» selon le mot de son président G. Gouzes.17

  2. Ce n'est qu'après l'adoption d'une motion de renvoi en commission, le jeudi 7 mai par 569 voix contre 2, que la commission des Lois de l'Assemblée nationale reprit le même amendement et l'introduit dans le projet de loi constitutionnelle. Par cette insertion qui «n'est pas lié(e) directement... au fond(du) débat constitutionnel», comme l'indique le Garde des Sceaux devant les deux assemblées,18 le gouvernement tient à manifester en l'occurrence son esprit d'ouverture.19 On peut en effet s'interroger sur cette apparition dans le débat et l'interpréter comme un geste du gouvernement en direction de l'opposition ou encore comme une manifestation du nationalisme des parlementaires face au franchissement

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    d'une nouvelle étape de la construction européenne quoiqu'en disent certains représentants de la Nation comme par exemple E. Alphandéry qui se défendra de faire «du nationalisme linguistique». Il est vrai qu'un groupe d'intellectuels avait interpellé le gouvernement; approché un certain nombre de parlementaires pour manifester leur souhait que soit intégré dans la Constitution un amendement allant dans ce sens.20 L'examen du texte par le Sénat s'accompagne d'une modification de la rédaction de l'insert initial: celui-ci devient «la langue de la République est le français». J. Larché, président-rapporteur de la commission des Lois du Sénat justifie cette modulation par le caractère «quelque peu impérialiste» de la rédaction retenue par l'Assemblée nationale21 faisant peu cas de l'existence de la communauté francophone. Selon les arguments avancés par les sénateurs, la modification est nécessitée par l'existence de la francophonie unissant une bonne vingtaine de nations qui ont proclamé que la langue française était leur langue officielle ou l'une de leurs langues officielles. Elle a aussi été demandée par de nombreux responsables politiques de cet espace francophone.22 La nouvelle rédaction adoptée à l'unanimité de 10 juin, confirmée en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, se retrouve donc dans la Constitution après le vote du Congrès intervenu le 23 juin 1992.

  3. En dehors de ces arguments avancés motivant les modifications rédactionnelles, les parlementaires ont présenté l'ajout comme devant remédier à une carence constitutionnelle. À ce propos fut une nouvelle fois évoquée la question de statut des langues régionales confirmant ainsi le jugement de D. Latournerie: «Si la querelle du français contre le latin est aujourd'hui très largement dépassée, celle des rapports de la langue nationale et des langues vernaculaires ne cesse de mobiliser les différentes familles politiques».23

    1. 14. Jusqu'à la récente révision, le statut juridique de la langue française ne disposait d'aucune base constitutionnelle. En effet aucun texte de cette nature ne prévoyait de disposition applicable en matière de langue française. Non seulement la Constitution, malgré ses 92 articles, était muette sur ce point, mais ni le préambule de la Constitution du 4 octo-

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    bre 1958, ni celui de la Constitution du 27 octobre 1946 auquel il renvoie, ni même les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République que ce dernier mentionne n'abordaient la question. Cette situation pouvait surprendre d'abord parce que, à l'exception des États-Unis d'Amérique, les États ont généralement des constitutions qui comportent des dispositions linguistiques,24 ensuite car une telle disposition aurait parfaitement trouvé sa place à l'article 2 qui définit quelques grands principes. D'autant que l'adoption de la Constitution fut entourée d'un très grand formalisme et que les «actants» du projet ont toujours pris grand soin d'expliquer sans détour et constamment leurs objectifs, leurs certitudes et les détours techniques employés pour les concrétiser.25 Sans doute les constituants ont-ils considéré à travers les deux siècles d'évolutions qu'une telle précision était superfétatoire tant il est vrai que l'histoire politique de la France est marquée par la suprématie du centre, de ses éléments uniformisateurs, sur les «patoisants» de la périphérie comme le démontre P. Deyon.26 La lecture des documents relatant les travaux préparatoires de la Constitution27 ne nous permet pas de confirmer expressément cette thèse, puisque l'on n'y trouve aucune trace -selon nous- de débats sur cette question. Mais il est clair qu'au moment où le constituant s'apprêtait à définir un cadre novateur de relations entre la métropole et ses colonies inspiré du Commonwealth, on a du mal à imaginer une autre voie.

  4. Cependant un ensemble de textes de nature juridique diverse, dont la rédaction fut étalée dans le temps, s'intéresse à la question. Traditionnellement lorsqu'on évoque le droit de la langue française on avance l'ordonnance sur «le fait de la justice» de François-ler du 15 août 1539, dite de Villers-Cotterêts. Elle prescrivait notamment de rédiger les arrêts des tribunaux en «langage maternel français» ainsi que les contrats et testaments. Une interprétation large de la formule -que conteste H. Peyre dans sa thèse28- conduit à lire «langue française» et déboucha sur la

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    mise à l'écart des parlers locaux: «ceux-ci, bien que non visés, furent victimes par prétention».29 Le processus sera toutefois lent à produire complètement tous ses effets comme en témoigne l'enquête de l'abbé Grégoire en 1790. La période révolutionnaire puis l'Empire feront eux aussi, avec leur ambition universaliste, oeuvre réglementaire dans ce domaine en étendant cet usage aux actes publics sans toutefois donner une définition précise de ce qu'il fallait entendre par cette assertion,30 Cependant ces différents apports manquent de cohérence et n'élèvent pas le statut de la langue française au niveau le plus haut de l'État comme en témoignent les incidents rapportés par D. Latournerie à la Chambre les 24 mars 1925 et 2 mars 1926. En effet aucun texte, et notamment pas les règlements des assemblées, ne précisaient que les différents actes de la vie parlementaire devaient avoir lieu en français, qu'il s'agisse des travaux en commission, des débats en séance publique, des questions, des projets ou propositions de lois. Ce silence exploité par des parlementaires d'Alsace, ce qui n'est sans doute pas un hasard, leur permit de s'exprimer en langue alsacienne lors des débats à l'Assemblée nationale.31 Quant à la loi du 31 décembre 1975 relative à l'emploi de la langue française, le moins que l'on puisse dire est que l'application qui en a été faite a été peu contraignante. Il est vrai que ce texte présente tantôt un caractère bureaucratique, tantôt un aspect lacunaire notamment en matière de sanction.32

  5. L'ordonnance de Villers-Cotterêts et la carence normative ont fait reposer sur le juge la charge de dessiner les contours du régime juridique applicable à la langue française. Le juge judiciaire a pris une position ferme s'agissant de l'emploi de la langue française. Dès le milieu du XIX siècle, la jurisprudence civile, à propos d'un exploit d'huissier corse rédigé en italien, a proclamé que l'expression en langue française était un «principe essentiel et de droit public qui importait, à un haut degré, à la bonne

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    administration de la justice et garantissait l'unité de la langue nationale».33 On observe que le juge civil a longtemps hésité à se fonder sur un texte34; il fallut attendre 1989 pour voir la Cour de cassation se référer à l'ordonnance de Villers-Cotterêts.35 La jurisprudence pénale a aussi retenu la règle de la rédaction en français des actes publics (jugements, actes de procédure...)- Seule atténuation traditionnelle et d'ailleurs encouragée par la convention européenne des droits de l'homme (art. 6 § 3): toute personne qui ne parle pas suffisamment le français peut bénéficier de l'assistance d'un interprète lors du procès.36 Même si le juge administratif ne fait pas apparaître avec certitude le fondement de sa solution,37 celui-ci considère comme une règle générale de procédure la rédaction des requêtes en langue française.38 Or il nous semble qu'il n'appartient pas au juge d'accorder ou de refuser une quelconque reconnaissance officielle à la langue en se substituant aux pouvoirs publics. La notion de langue officielle ne devrait pas être une simple notion «standard» à la merci du pouvoir souverain d'appréciation du juge.

  6. L'insertion faite par le pouvoir constituant dérivé a donc pour objectif de combler une carence, un oubli constaté dans l'oeuvre constitutionnelle historique de la Nation.39 Encore peut-on s'interroger à juste titre sur le point de savoir si cette insertion est juridiquement nécessaire, c'est-à-dire si en définitive le statut officiel de langue française n'est pas déjà fondé sur une base constitutionnelle? Deux hypothèses peuvent être accueillies. On peut soutenir en premier lieu que la langue française n'a

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    pas de base constitutionnelle en se fondant sur la conception hégélienne de l'État,40 reprise par l'École allemande de la fin du xlx et du début du xx siècles.41 Selon cette approche, la Nation peut exister malgré la diversité des langues et d'ailleurs la seule communauté de langue serait impuissante à créer la Nation.42 La «francophonie» illustre parfaitement cette tendance.43 Du reste, confronté à la ratification du Pacte international relatif aux droits civils et politiques signé en 1966 et prévoyant notamment le droit pour les minorités linguistiques d'employer leur propre langue, le gouvernement français n'a-t-il pas émis une importante réserve en rappelant que la domaine de la langue ne relève pas du droit public mais de l'exercice privé des libertés publiques par les citoyens.44 Mais on peut tout aussi bien adhérer à la thèse contraire, celle qui consti-tutionnaliserait la langue française. Cette thèse reposerait non pas tant sur une sorte de coutume juridique au sens où l'entendent généralement les administrativistes, mais plutôt sur la continuité constitutionnelle. En effet, le Conseil constitutionnel ne refuse pas de se référer à la «continuité constitutionnelle» pour étayer son argumentation.45 Le commissaire du gouvernement D. Latoumerie dans la fameuse affaire Quillevère46 notait aussi que le statut de la langue française était constituée par un ensemble de textes «depuis plusieurs siècles». Nous savons que certaines normes, certains principes ne sont pas posés par des textes, ne sont pas créés; ils préexistent, à tout le moins ils sont le socle constitutionnel sur lequel repose le système français depuis la Révolution.47 Héritiers du principe des nationalités, certains auteurs se sont même employés à présenter la langue

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    comme un élément de la Nation48 comme un fondement de l'unité nationale.49 Le Président de la République lui-même ne rappelait-il pas que la sauvegarde des langues minoritaires ne devait pas nuire à «ce qui fut un immense progrès de la fin du xix' siècle, notamment avec l'école, c'est-à-dire la diffusion d'une langue... sans laquelle nous serions hors d'état de préserver l'unité politique».50 La langue n'est-elle pas alors un élément de ce «socle constitutionnel»? Le Conseil constitutionnel n'a pas eu l'occasion de répondre à cette question. En effet, ni à propos du statut polynésien -où il n'a pas été saisi-, ni à propos du statut de la Corse -où la question ne se posait pas51-, le Conseil n'a été confronté à ce problème. Tout au plus, a-t-il été conduit à reconnaître que la promotion de la langue corse «ne porte atteinte à aucun principe constitutionnel»,52 mais sans viser expressément un principe, II semble cependant, à la lumière de la récente constitutionnalisation de la notion de peuple, que l'unité de la langue française pourrait, au même titre que l'unité de la Nation ou du peuple, constituer la transcription institutionnelle de l'unité de l'État.53 Si l'on admet la nature constitutionnelle de la langue française, il faut alors s'interroger sur la portée réelle de la réforme constitutionnelle du 23 juin 1992. Celle-ci n'aurait en définitive rien changé, mais aurait eu le mérite de clarifier le débat en donnant au droit de la langue française la cohérence juridique qui lui manquait.54

  7. Certains parlementaires ont souhaité étendre, de manière explicite, la référence de l'usage officiel du français aux collectivités territoriales. J.L. Masson («et des collectivités territoriales qui la [la République] composent» ou de X. Deniau («et des collectivités territoriales de la République») ont déposé des amendements allant dans ce sens. Ceux-ci sont

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    en définitive écartés sur le fondement des articles 2 («la République est indivisible») et 72 de la Constitution aux termes desquels les collectivités infra-étatiques sont partie intégrante de la République comme le souligneront à l'Assemblée nationale le Garde des Sceaux ainsi que plusieurs parlementaires.55

  8. Cette volonté de référencement constitutionnel n'est pas neutre politiquement, conditionnée qu'elle est par la construction européenne. En effet un des auteurs de l'amendement initial, A. Lamassoure, rejoint par P. Mazeaud, posera la question des langues de travail de la Communauté dans la perspective des élargissements futurs en ces termes: «Nous avons pu travailler dans une communauté de douze pays avec neuf langues... Cette règle pour des raisons pratiques évidentes ne pourra plus être maintenue dans une Europe de quinze, dix-huit ou vingt membres. II s'ensuivra donc une véritable concurrence linguistique...».56 Le marquage constitutionnel du statut de la langue française procéderait d'une attitude préventive vis-à-vis d'une discussion qui, selon ces parlementaires, ne manquera pas d'être ouverte avec les élargissements à venir. D'autant que la résolution du Parlement européen du 11 décembre 1990 (Voir supra) reconnaissant à la langue catalane le statut de langue d'usage57 dans les rapports CEE-pays catalans a pu être de nature à créer une nouvelle ' source d'inquiétude pour les parlementaires français. Et justement l'insertion de la référence à la langue française dans la Norme fondamentale a fourni l'occasion pour que soit abordée (une nouvelle fois) la question du statut des langues régionales. Quoi qu'il en soit, la formule retenue par la constituant, par sa solennité, par son caractère rituel, tend à solidifier, à consacrer, à légitimer l'avenir «performatif» de la langue française.

    1. L'évocation d'un éventuel statut des langues régionales

  9. Que ce soit à l'Assemblée nationale ou au Sénat, nombreux sont les parlementaires) notamment ceux issus des «régions périphériques» à forte identité, qui sont intervenus pour que la révision fournisse l'occasion de préciser la situation juridique des langues régionales. Cette préci-

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    sion présentait d'autant plus d'intérêt que la langue française allait recevoir un statut constitutionnel. Il est assez remarquable de noter, à ce propos, le silence des parlementaires issus des circonscriptions de Corse. Il aurait été souhaitable que ceux-ci fassent connaître leurs opinions en raison d'une part de l'acuité de la question, suscitant à l'occasion des mouvements d'opinion parfois violents comme ceux des hivers 1990 et 1991, et d'autre part de l'introduction, dans le récent statut de l'île, de nouvelles compétences relatives à l'enseignement de la langue corse.58

  10. Mais les interrogations sur le statut et l'enseignement d'une langue «régionale» ne sont pas exclusifs à la Corse, comme en témoignent les débats au Parlement. C'est que malgré les efforts d'uniformisation, «la France se nomme diversité», comme l'a si admirablement souligné F. Braudel: «Aucune force structurante qui en relève (du pouvoir), ne réussit à uniformiser une diversité qui a pour elle une sorte de force végétative. On la bouscule, elle repousse: ni l'ordre politique, ni l'ordre social, ni l'ordre culturel ne réussissent à imposer une uniformité qui soit autre chose qu'une apparence». Celui-ci ne démontre-t-il pas, à l'aide de cartes tirées de recensements organisés par les différents ministères de l'instruction publique du xix siècle, qu'en 1863 la majorité des communes restait encore non-francophones.59 En Corse, perdure même jusque sous le Second Empire un système de coofficialité entre le français et l'italien.60 De même en Alsace et en Moselle l'administration est amenée à tolérer un véritable bilinguisme, y compris sur le plan scolaire jusqu'à la veille de l'annexion allemande.61 C'est donc la troisième République qui fera

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    oeuvre d'unification (imparfaite) et d'imposition de la langue française comme langue de tous à travers, essentiellement l'enseignement laïque généralisé.62 Au delà de la langue, il est évident que les valeurs du nouveau modèle politique (républicain et laïque) allaient trouver là un vecteur efficace de propagation. Il fallut, de ce point de vue, attendre dans un premier temps la loi n° 51-46 du 11 janvier 1951, dite loi Deixonne, puis dans un deuxième temps la mise en oeuvre de la politique de décentralisation, en 1982, pour que soit rompue une longue tradition d'unification linguistique. Encore la culture reste-t-elle à bien des égards l'oubliée de la décentralisation.63

  11. Les dispositions de la Loi Deixonne réintroduisent la préoccupation des langues régionales au sein de l'éducation nationale du primaire à l'enseignement supérieur. Celle-ci sera suivie pour son application d'un grand nombre de textes, circulaires, arrêtés et décrets, qui ne possède pas «une totale unité conceptuelle».64 Cette appréciation autorisée illustre les difficultés que rencontrèrent les concepteurs qui tentèrent de faire coexister les principes issus de la longue période républicaine précédente et les nécessités exprimées par les revendications identitaires et la décentralisation.

  12. Cependant le caractère facultatif de l'enseignement n'est pas remis en cause, y compris pour les compétences contenues, en la matière, par les deux récents statuts corses. Une seule exception est à noter: celle introduite dans le statut de la Polynésie française. En effet la loi n° 84-820 du 6 février 1984 franchit pour le première fois une étape importante en transformant une faculté en obligation. Si son article 90 mentionne bien que l'enseignement est facultatif, comme sur le reste du territoire de la République, dans le second degré, il introduit aussi des obligations: celles de l'enseignement de la langue tahitienne dans les écoles maternelles, primaires et à l'école normale.65 Il est vrai que, d'une part le Con-

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    seil constitutionnel n'a pas été saisi dans cette hypothèse, et que d'autre part la Polynésie française est un territoire d'outre-mer (tom) et qu'à ce titre, son statut juridique dépend de l'article 74 de la Constitution autorisant le législateur à doter ces collectivités territoriales spécifiques d'institutions et d'organisations particulières.66 En ce qui concerne la Corse, si elle dispose «d'une organisation particulière à caractère administratif» qui par certains aspects (institutionnels principalement) peut faire penser à un tom, elle n'en possède nullement les compétences et la capacité «constitutionnelle» d'influer sur la production normative. C'est sans doute pour cette raison que le Conseil constitutionnel a tenu à rappeler, dans sa décision n° 91-290 du mai 1991 relative au nouveau statut de l'île, «que l'intégration de l'enseignement de la langue corse dans le temps scolaire n'est pas contraire au principe d'égalité à condition de ne pas revêtir un caractère obligatoire et de ne pas soustraire les élèves scolarisés dans les établissements de l'île aux droits et obligations applicables à l'ensemble des autres élèves français».

  13. Dans le prolongement de la loi Deixonne et du rapport Giordan remis au gouvernement en mars 1982 intitulé «Démocratie culturelle et droit à la différence», des propositions de lois ont été déposées à l'Assemblée nationale sans qu'aucune suite ne leur soit donnée par les gouvernements successifs.67 C'est sans doute pour cette raison et utilisant des arguments comparables à ceux avancés par les partisans de l'introduction de la référence au français dans la Constitution (maintien du pluralisme linguistique au niveau européen) qu'une douzaine de parlementaires, de sensibilités politiques différentes, manifestèrent le souhait que l'occasion fut saisie de préciser, dans un sens favorable, la situation des langues régionales. Dans les différentes interventions des parlementaires reviennent essentiellement trois interrogations adressées au gouvernement.

  14. La première consiste à lui faire préciser que la constitutionnali-sation du français n'a pas pour but «d'occulter les langues régionales» (Y. Dollo, député P.s.), «ne s'apparente pas à un diktat pour les régions fran-

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    çaises de métropole, pour la Corse ou les départements d'outre-mer» (M. Jacquaint, député P.c.f), «ne portera aucun préjudice aux langues régionales» (A. Zeller, député U.d.c). C'est la raison pour laquelle H. Goetschy, sénateur centriste d'Alsace, déposera un amendement tendant à compléter l'article 2 al. 2 par les mots «dans le respect des langues régionales et territoriales de France». Cet ajout permettrait, selon son auteur, de présenter des garanties constitutionnelles contre «toute exclusion intérieure».68 Les parlementaires transposeront l'argument de préservation du pluralisme exprimé à l'échelon européen, sur le plan interne. L'intervention de Y. Dollo illustre parfaitement cette optique: «C'est le choix de la diversité culturelle dans l'épanouissement de la démocratie politique européenne... Toutes les langues officielles, nationales, régionales, minoritaires doivent pouvoir vivre et se développer pour enrichir l'identité de l'Europe». Citons encore A. Zeller: «L'Europe souhaitée par ru.d.c. est celle de la diversité linguistique et culturelle».69 Interpellé sur ce premier point devant les deux chambres du Parlement, le Garde des Sceaux, M. Vauzelle, se contentera de rappeler «l'attachement des gouvernements successifs au développement de l'enseignement et au respect de ce patrimoine exceptionnel qu'est la richesse de nos langues régionales..., l'immense respect et le soin qu'il [le gouvernement] porte à cette richesse».70 Mais sa position restera très générale, et l'amendement sénatorial sera regardé comme inopportun. Il est cependant légitime de s'interroger sur les conséquences de la réforme s'agissant des langues régionales. Pourrait-on désormais envisager l'édiction d'un statut de coofficialité entre le français et une langue régionale? Il nous semble a priori difficile de soutenir cette hypothèse. En effet, le caractère [co]officiel d'une langue régionale sur une partie du territoire national serait de nature à entretenir une discrimination entre citoyens (fonctionnaires...) que ne manquerait pas de sanctionner le Conseil constitutionnel; par ailleurs, le statut de coofficialité ne saurait concerner les matières relevant de la seule compétence de l'État (justice, armée, police, Trésor, Éducation, Postes...). En réalité, on touche ici au problème de la coexistence linguistique. Et l'on peut se demander si, au fond, la survie d'un groupe linguistique est compatible avec l'aménagement de la coexistence linguistique. Le meilleur moyen de stabiliser l'existence d'une langue ne se traduit-t-il pas par le principe de la

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    territorialité

    qui garantit à un groupe une zone de «sécurité linguistique», c'est-à-dire un territoire sur lequel est pratiqué l'unilinguisme?71

  15. Directement liée à cette première interrogation, la question du statut des langues régionales est à nouveau soulevée, sans que le gouvernement n'y apporte d'élément de réponse. L'intervention du sénateur H. Goestchy, rappelant les promesses du président de la République et notamment son discours de Lorient en 1981 annonçant un statut des langues et cultures de France, n'y change rien.72 D'une manière générale les interventions sont favorables à la mise en forme rapide d'un statut pour les langues régionales. Seul R. Pandraud (R.p.r.) se prononce résolument contre: «Je ne suis pas de ceux qui considèrent que les dialectes ont été une source d'enrichissement pour notre pays... S'il faut apprendre une autre langue à nos enfants, ne leur faisons pas perdre de temps avec des dialectes qu'ils ne parleront jamais que dans leur village».73 Le régime des langues régionales reste soumis à un ensemble de textes législatifs et réglementaires disparate, hétérogène et lacunaire. Le droit des langues minoritaires est à créer.

  16. Enfin le gouvernement est questionné (J. Briane à l'Assemblée nationale et H. Goestchy au Sénat) sur l'attitude de la France au Conseil de l'Europe à propos de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, dite résolution 192. Celle-ci propose aux Etats membres de l'organisation internationale de mettre en -uvre un ensemble libéral de mesures tendant à reconnaître, sur leurs aires géographiques et au delà des frontières administratives, les diverses «langues régionales ou minoritaires en tant qu'expression de la richesse culturelle».74 Les domaines dans lesquels doivent s'appliquer ces mesures sont énumérés dans la partie III de la Charte: tous les niveaux d'enseignement (art. 8), les différents ordres juridictionnels (art. 9), l'activité des autorités et services publics (art. 10), les média (art. 11), les activités et équipements culturels (art. 12), la vie économique et sociale (art. 13), les échanges transfronta-

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    liers (art. 14). Chacun de ces articles contient des options plus ou moins favorables aux langues régionales ou minoritaires. Les États sont invités à choisir parmi celles-ci les solutions qu'ils désirent développer compte tenu des traditions et des demandes existantes. Par exemple, l'article 8 sur l'enseignement, quel qu'en soit le niveau, prévoit une graduation dans les interventions. Il est évident que les conséquences entre l'introduction d'un enseignement des langues régionales, l'organisation dans la langue «d'une partie substantielle» de l'enseignement (en général), ou encore leur apprentissage laissé aux seuls «élèves dont les familles le souhaitent» n'ont pas la même portée juridique.75 Ainsi la Charte ne présente donc pas un cadre rigide pour les États qui, s'ils souhaitent la transposer en droit interne, doivent viser dans les documents de ratification d'une part les langues concernées et d'autre part indiquer les différentes mesures applicables. Celles-ci ne pourront se situer en deçà d'un minimun de «trente-cinq paragraphes ou alinéas choisis parmi les dispositions de la partie III, dont au moins trois choisis dans chacun des articles 8 et 13, et un dans chacun des articles 9, 10, 11 et 13» conformément à l'article 2 al. 2 de la Charte. De plus les articles 15, 16 et 17 préconisent un système de contrôle organisé par les parties contractantes à partir de rapports périodiques présentés au Secrétaire général du Conseil après examen d'un comité d'experts indépendants.

  17. Si le gouvernement n'a pas jugé opportun de répondre aux interrogations des parlementaires durant le débat sur la révision, la question demeure d'actualité. En effet de manière presque concomitante à l'adoption de la révision constitutionnelle, le comité des ministres du Conseil de l'Europe adopte le 29 juin 1992 la Charte européenne sur les langues régionales ou minoritaires. Cette adoption ouvre à compter du 5 octobre de la même année, la période de signature de la convention par les États

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    qui le désirent et qui devront, par la suite, la ratifier avec les moyens juridiques appropriés. Celle-ci interviendra, pour la France, dans un cadre constitutionnel modifié. Modifié d'abord puisque la Constitution fait explicitement référence à la langue française et que cette disposition peut, dorénavant, être utilisée devant le Conseil constitutionnel. Modifié aussi, parce que la révision constitutionnelle du 23 juin 1992 ouvre la saisine du Conseil constitutionnel à soixante députés et/ou soixante sénateurs sur le fondement de l'article 54 de la Constitution. Ainsi une déclaration de non conformité par la Haute instance de certaines dispositions contenues dans la Charte entraînerait, en fonction de la détermination du Gouvernement, soit une nouvelle révision de l'article 2 de la Constitution, soit un abandon pur et simple de la ratification. On peut donc considérer, avec quelques raisons, que la question de la reconnaissance normative de la langue française mais aussi des langues régionales de France n'est pas close et qu'elle devrait connaître, à court terme, de nouveaux développements.

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    [1] Décis. n° 92-308 DC du 9 avr, 1992; sur le processus de la saisine et le commentaire de la décision du Conseil constitutionnel, Voir L. Favoreu, Rev. fr. dr. constit, 1992, p, 334; B. Genevois, «Le Traité sur l'Union européenne et la Constitution», Rev. fr. dr. adm. 1992, p. 373; F. Luchaire, RDP 1992, p. 589.

    [2] La formulation votée par l'Assemblée nationale à l'unanimité le 12 mai est modifiée par le Sénat le 10 juin suivant. Voir le compte rendu intégral Assemblée nationale n° 26, 13 mai 1992, p. 1018-1022 et compte rendu intégral Sénat, 10 juin 1992, p. 1536-1541.

    [3] Rapport de la commission des Lois du Sénat «Des communautés européennes et de l'Union européenne», p. 62, Sénat n° 375.

    [4] N° 26 (1) an(cr) 13 mai 1992, p. 1018.

    [5] Ibidem, p. 1019.

    [6] Ph, Ardant, «Le contenu des constitutions: variables et constantes», Pouvoirs, n° 50, p. M, 1989.

    [7] Traité sur l'Union européenne, p. 48-49, Office des publications officielles des Communautés européennes, Luxembourg, 1992.

    [8] CJCE, 11 juill. 1985, Mutsch.

    [9] Voir notamment la recommandation n° 928 relative aux problèmes d'éducation et de culture posés par les langues minoritaires et les dialectes en Europe du 7 oct. 1981, Ass. parlem. du Conseil de l'Europe, 33" session ord., compte rendu p. 582-599.

    [10] Voir Directive 79/112/cee dite «Etiquetage» du 18 déc. 1978 (joce, L 33 du 8 févr. 1979, p. 1) et le commentaire de L. Van Bunnen (L'emploi des langues dans l'étiquetage et le droit communautaire, Journal des Tribunaux, n° 5448 du 16 janv. 1988, Bruxelles), Voir aussi, A. Mattera, Le marché unique européen, ses règles, son fonctionnement, 2º éd., Jupiter, 1990, p. 477.

    [11] L. Jacobv, Les activités des Communautés européennes en faveur des langues et cultures moins répandues 19811989, Bureau européen pour les langues les moins répandues, 21 pages, 22 janv. 1990.

    [12] Ibidem.

    [13] P. Pinna, Etnie e gnippi lingtiistici nMe regioni a statuto spéciale, Cooperazione mediterranea, isprom, éd. scientif. ital. 1989/2.

    [14] P.E. 128-505.

    [15] Reconnaissance européenne du catalan, Contact-bulletin, vol. 7, n" 3, hiver 1990/1991, Bureau européen pour les langues les moins répandues.

    [16] Cl. Olwesi, Communauté européenne et régions: un binôme institutionnel d'avenir?, in La Corse-Autour, L'Harmattan, 1992.

    [17] N° 26 (1) a.n.(c.R.), p. 1019.

    [18] Sénat, compte rendu intégral, séance du 10 juin 1992, p. 1540 et A.N.(c.R.), préc.

    [19] a.n.(c.r.), p. 1019, préc.

    [20] «La francophonie dans la Constitution», Le Monde, 8 mai 1992, Voir aussi l'appel pour l'avenir de la langue française.

    [21] Sénat C.R.p. 1539, préc.

    [22] Voir l'argument avancé par le sénateur J. Havert (R.p.r.), Sénat, p. 1541, préc.

    [23] «La langue française et le DroiD>, Études et Documents du Conseil d'État, 1984-1985, n° 36, p. 88 et suiv.

    [24] B. Touhet, L'aménagement constitutionnel des Etais de peuplement composite, éd. Presses Univ. Laval, Québec, 1972.

    [25] F. Thibaut, «La sémantique de la Constitution», in Colloque du 3(f anniversaire de la Constitution, Aix-en-Provence, 8-10 sept. 1988.

    [26] Paris et ses provinces, le défi de la décentralisation 1770-1990, Armand-Colin, 1992.

    [27] Documents pour servir à l'histoire de l'élaboration de la Constitution du 4 oct. 1958, 3 vol., La Doc.frse, 1987, 1988 et 1991.

    [28] Le roi et les langues provinciales, thèse Paris, Les Presses modernes, 1933. Voir aussi F. Olivier-Martin, Histoire du droit français des origines à ta Révolution, Domat-Montchrestien, 1948, p. 390, rééd. éd. cnrs 1968.

    [29] A. Brun, Recherches historiques sur l'introduction du français dans les provinces du Midi, thèse Paris, éd. Honoré-Champion, 1923.

    [30] Voir l'excellent article de D. Latournerie, préc.

    [31] Le 24 mars 1925, lors de la discussion du projet de loi portant sur la réorganisation du régime administratif des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, un député, M. Hueber (communiste), manifesta sa volonté de présenter ses observations «dans la langue du peuple alsacien». Un autre député revendiqua ce droit «pour le dialecte breton». Le même parlementaire alsacien se manifesta à nouveau en 1926. Le bureau de la Chambre décida le 30 mars 1926 «qu'à l'avenir les discours devront être uniquement prononcés en français», in Nouveaux suppléments au Traité de droit politique, électoral et parlementaire d'EuGÈNE-PiERRE, t. 1 (1924-1945), La Doc. frse, 1984.

    [32] D. Latournerie, préc.

    [33] Civ. 4 août 1859, Giorgi c/Masaspino, Sirey 1859, p. 43.

    [34] Civ. 11, 17 iévt. 1981, n° 176 (contrat d'assurance).

    [35] Civ. 21. 11 janv. 1989, Bull. civ. II, n° 11, p. 5, D. 19S9, Somm, 182, obs. Julien, Gaz. Pal. 7-8 juin 1989, rtdc 1989, p. 619, obs. R. Perrot.

    [36] Crim. 24 mai 1951, Bull. crim. n" 145; Crim. 13 févr. 1974, Bull. crim. n° 65,

    [37] R. Chapus, Droit du contentieux administratif, T éd., 1990, p. 303.

    [38] Cons. d'État, Sect. 22 nov. 1985, rec. p. 333; Cons. d'État, 22 mars 1989, Mu-dalige, rcc. p. 99.

    [39] La commission dite Edgard Faure créée le 20 déc. 1975 par l'Assemblée nationale afin d'élaborer une synthèse de trois propositions de lois émanant de la majorité, du P.s. et du P.c.f. (Rapport de synthèse de MM. Foyer et Pignon n° 3455 du 21 déc. 1977, 3 vol., joan doc. 21 déc. 1977) élabora une proposition de loi constitutionnelle visant à «reconnaître et protéger la diversité des cultures», Les amendements tendant à garantir la défense des langues minoritaires (amendement n" là l'art. 12 de N. Alfonsi, amendements n° 6 et 7 à l'art. 37 de R. Forni et amendements n° 2 à l'art. 12 et n° 8 à l'art. 37 de G. DuCOlonë) ont été rejetés. Finalement cette proposition n'aboutit jamais (R. Grau, Les langues et les cultures minoritaires en France, approche juridique, Conseil de la langue française, éd. off. Québec, 1985, p. 71).

    [40] Hegel, Oeuvres, vol. VII, T éd., 1840, p. 423 et suiv.

    [41] G. Jelunek, Introduction à la doctrine de l'Etat, traduct. frse Fontemoing, 1904, p. 206.

    [42] L. Ducuit, Traité de droit constitutionnel, t. 2, Fontemoing, 1928, p. 7.

    [43] R. Carre dis Malbekg, Contribution à la théorie générale de l'Etat, t. 2, Sirey, 1922, p. 7. Voir aussi X. Deniau, La francophonie, 2' éd., Que sais-je?, 1992.

    [44] Déclaration du gouvernement français à la commission des droits de l'homme du Conseil économique et social des Nations Unies, Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et la protection des minorités, Étude des droits des personnes appartenant aux minorités ethniques, religieuses et linguistiques, rapporteur F. Capotorti, e/nc 4 sub. 2/384, 30 mars 1977.

    [45] Décis. n° 91-290 DC du 9 mai 1991.

    [46] Cons. d'État Sect. 22 nov. 1985, rec. p. 333, Voir aussi rdp 1986, p. 1175, obs. R. Drago, Dr. admin. 1986, n° 58, ajda 1985, p. 751 et 716, chron. S. Hubac et M. Azibert, D. 1986, 71, note J.J. Thouroude, Voir encore T. A. de Rennes, 21 nov. 1984, Quillevère, D. 1985. 467, note R. Rouquette.

    [47] Association fr. des constitutionnalist.es, La continuité constitutionnelle en France de 1789 à 1989, Journées d'études des 16-17 mars 1989, Economica, 1990.

    [48] M. Hauriou, Précis de droit constitutionnel, E. éd., Sirey, 1929, p. 80 et suiv.; M. Prélot, Sociologie politique, Précis Dalloz, 1973, n° 86^ et 88.

    [49] Voir les analyses de A. Demichel, «L'avenir de l'État?», in La Corse-Autour, op. cil. et de G. Héraud, «Le clivage linguistique et le fait national», Colloque Région et régionalisme en France du XVIIF siècle à nos jours, Strasbourg II, 11-12 oct. 1974, puf, 1977.

    [50] F. Mitterrand, déclaration 6 juill. 1984, Clermont-Ferrand.

    [51] L'amendement présenté par le groupe communiste à l'Assemblée nationale et portant statut de coofficialité des langues française et corse n'a pas été retenu, Voir Doc. A.N. 23 nov. 1990, p. 5954,

    [52] Décis. nº 91-290 DC du 9 mai 1991.

    [53] J.P. Pastorel, «Quelques réflexions à propos d'une récente décision du Conseil constitutionnel sur le statut de la Corse», Rev. recb. jurid. 1992, p. 55.

    [54] Voir l'excellente tkèse de R. Rouquette, Le régime juridique des tangues en France, thèse Paris X-Nanterre, dactyl., 1987.

    [55] Sur les interventions du Garde des Sceaux, et des députés P. Mazeaud et Ch. Millon, Voir A.N. (C.R.) p. 1021 et suiv., préc.

    [56] A.N. (C.R.), p. 1021-1022, préc.

    [57] Sur le régime linguistique de la cee, Voir M. Chr, Bergères, Contentieux communautaire, coll. Dr. fondamental, PUF, 1989, n° 86.

    [58] Voir ia loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse (JO, 14 mai 1991, p. 6318) notamment ses articles 53 prévoyant un plan de développement de l'enseignement de la langue et de la culture corses et son insertion dans le temps scolaire, et 55 permettant la réalisation de programmes de télévision et de radiodiffusion ayant pour objet le développement de la langue et de la culture corses: J.P. Pas-torel, «Les compétences de la collectivité territoriale de Corse», Kev.fr. dr. aâmin. 1991, p. 741 et suiv.

    [59] Selon F. Braudiîi., en 1835, la langue française est encore cantonnée dans les vieilles terres d'oiî. En 1863, selon une enquête officielle du ministère de l'Instruction publique, les parlers locaux occupent encore une grande partie du territoire. Voir L'identité de la France, Aubin, 1986, p. 60, 80 et suiv.

    [60] J. Billard, La coofficialité langue française, langue italienne, fin KVJlT-début XIX1 siècles, 2 vol., mémoire de maîtrise Univ. de Corse, s/d J.Y. Coppoi.ani, dactyl., 1991.

    [61] G. May, «La lutte pour les français en Lorraine avant 1870, étude sur la propagation de la langue française dans les départements de la Meurthe et de la Moselle», Annales de l'Est, 1912; E. Phiupps,, Les luttes linguistiques en Alsace jusqu'en 1945, Culture alsacienne, L'Alsatique de poche, Strasbourg, 1975, rééd. 1986.

    [62] F. Brunot, Histoire de la langue française, A. Colin, 13 t., 1905-1913, rééd. 1968; J.M, Gaillard, Jules Ferry, Fayard, 1989; A. Prost, L'enseignement en France, A. Colin, 1968.

    [63] P. Baleynaud, «La culture: l'oubliée de la décentralisation?», RDP 1991, p. 149.

    [64] Voir l'article de D. Latournerie, préc.

    [65] Art. 90: La langue tahitienne est une matière enseignée dans la cadre de l'horaire normal des écoles maternelles et primaires. Cet enseignement est organisé comme matière facultative et à option dans le second degré. Sur décision de l'assemblée territoriale, la langue tahitienne peut être remplacée dans certaines écoles maternelles et primaires par l'une des autres langues polynésiennes. L'étude et la pédagogie de la langue et de la culture tahitiennes seront à cet effet enseignées à l'école normale mixte de la Polynésie française.

    [66] Cet article a été modifié par la révision du 23 juin dernier qui fait dorénavant obligation au Parlement d'arrêter et de modifier les statuts des tom par des lois organiques.

    [67] Ii s'agît notamment des propositions de loi n° 2157 du 24 mars 1984 sur la promotion des langues et cultures de France déposée par MM. Destrade et autres, n° 2321 du 31 juill. 1984 relative aux langues de France et aux cultures régionales déposée par MM. Beunhes et autres, du 23 mai 1985 sur le statut et la promotion des langues et cultures régionales déposée par M. Briane, du 19 nov. 1991 sur le statut et la promotion de la langue en Alsace et en Moselle (Mercator, mai 1992, n° 2).

    [68] H. Goestchy, Sénat, 10 juin 1992, compte rendu intégral, p. 1539.

    [69] A.N.tCR.J, p- 1019-1020, préc.

    [70] Voir A.N. p. 1021, et Sénat p. 1540, préc.

    [71] Voir les réflexions de J. Woehrijng, «La Constitution canadienne et l'évolution des rapports entre le Québec et le Canada anglais de 1867 à nos jours», Rev. fr. dr. comtil, 1992, p. 195 et de J. Vovarne, «Le statut des langues en Suisse», in P. Pupier et J. Woehrung, Langue et droit (Actes du 1er Congrès de l'Institut international de droit linguistique compare), Montréal, Wilson et Lafleur, 1989, p. 343.

    [72] H. Goestchy, ibidem.

    [73] A.N. p. 1539, préc.

    [74] Projet de Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, cahi_r(92) 1, Strasbourg, 9 janv. 1992, 23 pages.

    [75] Dans le domaine de l'enseignement préscolaire (art. 8-1 a), la Charte indique que les parties «s'engagent... à: I. prévoir une éducation préscolaire qui soit assurée dans les langues régionales ou minoritaires ou; II. prévoir qu'une partie substantielle de l'éducation préscolaire soit assurée dans les langues régionales ou minoritaires, ou; III. appliquer les mesures visées sous I et II ci-dessus au moins aux élèves dont les familles le souhaitent et dont le nombre est jugé suffisant ou; IV. si les pouvoirs publics n'ont pas de compétence directe dans le domaine de l'éducation préscolaire, favoriser et/ou encourager l'application des mesures visées sous I et III ci-dessus». On retrouve une graduation comparable dans tous les secteurs mentionnés dans la Charte.

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